La formation Captain 2

Avons-nous toutes les compétences nécessaires à la fonction de commandant ? Quels sont nos qualités et nos défauts pour cela ? Cette deuxième étape de la formation nous apporte une prise de conscience de notre avenir proche et nous amène à nous questionner sur nous-même et nos compétences. Nous avons eu des cours sur le droit aérien, la performance clients, la sécurité des vols. Mais aussi sur des domaines moins techniques comme le leadership, la communication, et la confiance en soi. Nous sommes une promo de 10 pilotes, dont la moitié ira sur Airbus A220 et l’autre moitié sur Boeing 737.

C’est l’occasion de se replonger dans nos manuels tout en changeant de regard dessus. Car prochainement, nous serons responsable de la sécurité de l’exploitation de l’avion, de nos passagers, de notre équipage et du fret. Nous porterons aussi la responsabilité de la mission commerciale, c'est-à-dire : ponctualité, régularité, confort, information régulière, et… port de l’uniforme. Cela fait déjà beaucoup de casquettes à porter n’est-ce pas ? Mais ce n’est pas tout, les notions de droit aérien abordées nous rappellent que nous serons également l’autorité à bord. Le Captain doit, s’il le faut, donner les ordres permettant d’assurer la sécurité, de débarquer une personne ou un chargement qui représente un danger. 

Le métier c’est aussi des tâches qui nécessitent une habileté à gérer les priorités. Nous devrons nous assurer à chaque vol que la visite prévol aura été effectuée, et que l’Aircraft Technical Logbook (le livret de suivie de maintenance de l’avion) aura été rempli et signé. En outre, nous devrons nous assurer de la présence des équipements de sécurité, de la quantité d’oxygène, d’huile, et de carburant nécessaires au vol est à bord. Bien entendu, nous restons les garants du respect des limitations opérationnelles et de l’accessibilité météo de nos terrains de destinations et de dégagement… Voilà qui résume sur le papier, les grands axes de la fonction : responsabilité, autorité et tâches. Mais tout cela est finalement assez connu de tout pilote exerçant ses fonctions, d’un avion monopilote à un Boeing 777…

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En réalité, comme cité en introduction, nous devons nous questionner sur nous-même pour nous améliorer. Ai-je mesuré l’ensemble de mon rôle ? Ai-je mesuré si je serai à la hauteur de celui-ci ? En trouvant les réponses à cela, nous pourrons désormais savoir sur quel domaine nous devrons travailler le plus. En effet, d’un point de vue technique, après 7000 heures de vols, nous saurons fournir le travail adéquat à l’apprentissage d’un nouvel avion, mais nous aurons moins de temps pour travailler sur nous-même. Car désormais quand tout ira bien, comme quand tout ira mal, tous les regards seront pointés sur nous. Mais alors, qu’attendent les passagers de nous ? Et vous qu’attendez-vous de votre commandant quand vous partez en voyage ? (Expert, leader, exemplaire, à l’écoute, courageux, vigilant, sérieux, présent, humain?)

Pour creuser le sujet nous avons ensuite eu 2 jours de formation sur le leadership, et la communication. Le questionnement, l’écoute, l’intelligence émotionnelle, sont autant de notions dont j’avais vaguement entendu parler jusqu’ici mais qui, au travers de ce stage, deviennent des outils pour notre avenir. Ce furent les 2 jours les plus riches d’enseignement que je n’avais pas vécus depuis longtemps. Lorsque vous avez des choix difficiles à faire dans votre vie, vous avez plusieurs possibilités : demander l’avis aux autres, ce que le commandant fait avec son copilote. Ou prendre le temps de la décision, vous renseigner sur le sujet, chose qui est parfois plus difficile à 900 km/h. Mais alors qu’une grande partie de l’opinion publique pense que nous sommes des êtres résistants, sans émotions, c’est tout le contraire. L’avantage que nous avons c’est de travailler sur la connaissance de soi, il faut savoir s’écouter et prendre du recul .

Les émotions, du latin “Movere” qui veut dire bouger, sont des impulsions qui nous font agir. Joie, peur, colère, tristesse, ces 4 émotions de base ne trouvent pas toujours place dans un cockpit. En réalité, c’est sur l’intelligence émotionnelle que nous travaillons. L’ensemble des aptitudes émotionnelles et sociales qui nous sont propres et qui influencent la façon dont nous nous exprimons, et nous prenons des décisions. Reprenons, avec les facettes de l’intelligence émotionnelle, le cas d’une panne relativement importante en croisière, qui bien que maitrisée nécessite un déroutement.

Gestion du stress : Cette panne a généré du stress, c’est normal et cela me donne l’adrénaline pour gérer la situation. Avoir une tolérance au stress sans qu’elle ne devienne néfaste et voir le bon côté des choses. Nous avons le contrôle de la situation. Prise de décision : contrôler nos impulsions, avoir la capacité à résister à une tentation d’agir vite. Il y a un terrain juste en dessous de nous c’est tentant d’y aller mais non, je vais devoir vérifier la météo et sa longueur de piste et peut-être envisager d’autres solutions. Relations humaines : capacité à identifier et prendre en compte les émotions d’autrui. Mon équipage doit avoir de l’incompréhension, dès que le temps le permet je leur expliquerai. Les passagers risquent d’avoir peur, je me dois de les rassurer dès que possible. L’expression individuelle : nous-deux, pilotes, devons avoir la capacité à exprimer nos pensées et opinions sur la situation en restant maître de nous même. Mon copilote n’est pas d’accord avec ma décision, il va me le dire. Il doit me le dire.

Le leadership c’est quoi? Vous avez 1 heure, à vos stylos!

Le leadership c’est quoi? Vous avez 1 heure, à vos stylos!

Enfin, nous avons eu 2 jours sur des analyses de situations et d’événements complexes qui ont eu lieu par le passé. L’occasion d’aborder la vraie difficulté du métier du commandant de bord : la prise de décision dans les zones grises. En effet, si la totalité du travail se situait dans des zones blanches ou noires, avec une procédure ou une check-list à appliquer, alors le métier serait simple, et nous aurions déjà été remplacés par des machines. En réalité le travail de commandant commencera là où il n’y aura pas de réponse pré-établie à la situation que nous rencontrerons. Ce qu’il faut retenir c’est qu’en dehors de nos compétences techniques, nous ne sommes pas formatés, il n’y pas un commandant pareil. Il faut pouvoir apporter sa pierre à l’édifice dans la gestion des passagers, du vol, de son équipage… Pierre qui résultera en grande partie de notre expérience. C’est le moment de montrer qui nous sommes.

La suite au prochain épisode, avec la rentrée en compagnie chez Transavia et la qualification technique 737 prévue en Août. Portez-vous bien !

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